Les Megret gérent la villeLes Megret gérent la ville
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Délégué général du Front national depuis 1988, l’homme politique Bruno Mégret est élu au conseil régional de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur en 1992 et souhaite ajouter une mairie à son tableau de chasse. Il jette son dévolu sur Vitrolles, où son parti fait des scores importants. Il rate de peu la mairie en 1995, et compte bien se représenter au scrutin municipal suivant. Las !, il se trouve frappé d’inéligibilité, pour non-respect des règles de financement de sa campagne électorale. Qu’à cela ne tienne, il désigne sa femme comme remplaçante. Elle est élue en février 1997. Commence alors le règne des époux Mégret sur la commune de Vitrolles.
Cette actualité politique attire l’attention du dessinateur Luz (alias Renald Luzier), entré depuis peu à Charlie Hebdo. Pendant près de trois ans, Luz va hebdomadairement faire la chronique de la gestion municipale des époux Mégret, sous la forme de « colonnes » intitulées « Les Mégret gèrent la ville ». Ce faisant il renoue avec une tradition de mise en cause directe des hommes politiques qui a une longue histoire en France, et a connu ses plus grandes heures de gloire de la fin du XIXe siècle aux années 1930. Charlie Hebdo a pratiqué l’exercice dans les années 1970, du temps où Cabu racontait Les Aventures de Madame Pompidou. Luz se consacre aux époux Mégret avec une gourmandise particulière et, comme le prouve les extraits présentés aujourd’hui, n’hésite jamais à taper là où ça fait mal. Présenté sous le pinceau de Luz comme un nabot sadique et colérique qui tente de canaliser la sotte naïveté de son épouse, le vrai Bruno Mégret goûte peu l’exercice et proteste avec véhémence, menaçant même de procès l’artiste et le journal qui le publie, sans que cela ne refroidisse la faconde de Luz. Le couple Mégret met sa menace à exécution en 1998 lorsque paraît le recueil des chroniques hebdomadaires, et attaque Luz en diffamation. Le dessinateur se trouve relaxé de tous les chefs d’accusation, au nom du droit à la satire.
Réélue en 2001 à la mairie de Vitrolles, Catherine Mégret voit son élection annulée par décision de justice. Elle est battue en 2002 et doit répondre devant la justice de diverses accusations pour discrimination et détournement de fonds. Elle est condamnée à plusieurs amendes et à deux ans d’inéligibilité, et se retire conséquemment de la vie politique. Son mari fait de même en 2008.
De son côté Luz a poursuivi la carrière que l’on sait.