Les Naufragés du temps , ample saga de science-fiction, voit le jour en 1964 dans le magazine Chouchou , magazine de bande dessinée très en avance sur son temps et qui, de ce fait, ne vivra que quelques mois. Elle est scénarisée par Jean-Claude Forest, qui prend pour l’occasion le pseudonyme de Jean-Claude Valherbe, et dessinée par Paul Gillon . Ce dernier qui, en 1940, a commencé précocement une carrière d’autodidacte à l’âge de 14 ans en illustrant les « petits formats » des chansons alors en vogue de Charles Trenet, Tino Rossi, etc. a déjà derrière lui une longue carrière de dessinateur de presse et de bande dessinée. Il a travaillé pour Vaillant et dessiné de nombreuses histoires, dans tous les genres de l’aventure. Marqué par Alex Raymond et Milton Caniff, il a également subi l’influence de Raymond Poïvet, référence incontestée de toute une génération de dessinateurs réalistes. Les lecteurs de France Soir le connaissent également comme le dessinateur de 13, rue de l’espoir , rare tentative extrêmement réussie de daily strip à la française, qui a paru de 1959 à 1972. Les Naufragés du temps est considéré comme un des sommets de la carrière de Paul Gillon, et l’une des plus grandes réussites de la bande dessinée française de science-fiction. Après les débuts interrompus dans Chouchou , la saga reparaît dans France Soir en 1974 et 1975. Gillon la conclura seul dans Métal Hurlant entre 1977 et 1980. Forest et Gillon ont imaginé qu’un couple d’occidentaux de la fin du XXème siècle ont été placé en hibernation pour une durée de mille ans. Quand ils se réveillent, ils découvrent une Terre en proie au chaos, dominée par les Trasses, animaux humanoïdes qui tentent de conquérir le système solaire. Les héros, Christopher Cavallieri et sa compagne Valérie, vont se trouver au cœur du combat contre les Trasses. Jean-Claude Forest revisite les thèmes classiques de l’heroïc fantasy en y injectant beaucoup de ses obsessions habituelles et ses scénarios foisonnants sont un véhicule idéal pour le trait souple et élégant de Paul Gillon, lequel est connu pour le format imposant de ses planches originales. La planche présentée aujourd’hui mesure par exemple plus de 87 cm de hauteur sur 71 cm de largeur. On admirera l’alternance de gros plans et de plans généraux et la manière dont Gillon répartit avec efficacité les bulles d’un dialogue abondant.