La paresse est le signe du mal-être de Bernard Lermite, lointain cousin d’Oblomov. Bourgeois inactif, il n’attend rien de l’existence et se trouve disponible à toutes les aventures qui se présentent à lui. Elles ne manquent pas d’advenir mais se déroulent dans le registre exclusif de l’humour. Rétif à toute forme de romantisme, imperméable à l’héroïsme, Lermite se laisse porter par la fortune, ne manifestant quelque initiative que lorsque qu’il croise une personne du beau sexe. Rien de chevaleresque alors dans son comportement : il se contente de profiter de la sollicitude de toutes ces femmes que sa placidité intrigue et provoque, dans une forme de marivaudage inversé où c’est l’homme qui est la proie et la femme la chasseresse. Ancien étudiant des Arts décoratifs de Paris, Martin Veyron tâte de la publicité et du dessin de presse, avant de créer le personnage de Bernard Lermite en 1977, pour L’Echo des Savanes première formule. Il lui fait vivre pendant seize ans des aventures qui oscillent entre humour et fantastique, avant de dessiner L’Amour propre , comédie sexuelle qui reste son plus grand succès à ce jour. S’ensuivent plusieurs albums ( Executive Woman , Jivara , Donc, Jean… , d’après le mythe de Don Juan…) qui mettent en scène diverses incarnations de la bourgeoisie française, dans des histoires qui brillent par leurs dialogues ciselés. Veyron s’aventure dans la réalisation de film (l’adaptation de L’Amour propre ), la littérature ( Trémolo Corazon , son unique roman à ce jour), avant de revenir à la bande dessinée à la fin des années 1990. Il a depuis publié une demi-douzaine d’albums, dont tout récemment Ce qu’il faut de terre à l’homme , inspiré d’une nouvelle de Léon Tolstoï. Il a également travaillé comme scénariste avec Jean-Marc Rochette (la série Edmond le Cochon , Cour royale ) et abondamment dessiné pour la presse ( Libération , Le Nouvel Observateur , L’Evénement du jeudi ...). Bernard Lermite chope la petite mort est la septième aventure de Bernard Lermite, parue dans L’Echo des savanes en 1978. Elle est parfaitement représentative de la première manière de Martin Veyron : découpage extrêmement fluide, dialogues rapides et utilisation massive de trames mécaniques, particulièrement efficaces dans cette scène urbaine et nocturne.